Singulier pluriel
Cinquante « courts-métrages » clandestins
Dessins Marcel Laliberté
Editions Publi-Libris (sans indication de lieu), 2004, 176 pages
Le Marchand de tabac
C'est lui qui sert. Sa femme est derrière le rideau. On l'entend qui « marmotte » comme il dit. C'est toujours le même reproche qu'il lui fait, « on t'entend marmotter jusque devant, ce n'est pas bien pour les clients » .
Quand il sera au bistrot, à onze heures (onze heures, c'est l'heure, c'est l'heure de l'apéro) elle prendra le relais, en surveillant la fricassée de champignon ou l'omelette au lard. Quand il rentrera, ce sera toujours trop tard, car c'est prêt depuis longtemps. Elle pleurniche. Elle dit : « J'aurais dû prendre un amant ! » Il se marre. Depuis le temps que c'est trop tard, même quand c'est le moment.
Gil Pidoux, Singulier Pluriel, p. 105-106.